Petits conseils aux enseignants-chercheurs qui voudront réussir leur évaluation.

Un magnifique texte de Grégoire Chamaillou, en ligne sur le site Contretemps : http://contretemps.eu/interventions/petits-conseils-enseignants-chercheurs-qui-voudront-reussir-leur-evaluation

Extrait : « Nietzsche l’avait prédit : nous sommes entrés dans l’ère des marchands. Leur culture a triomphé. C’est essentiellement une culture de l’évaluation. Le triomphe d’un nouveau regard évaluateur, et avec lui d’une nouvelle question directrice, la « question des questions », posée plus haut que toutes les autres : « quels gens et combien de gens consomment cela ? ».
Muni de cette question, le marchand, poursuivait Nietzsche, « l’applique dès lors instinctivement et constamment à tout, et donc aussi aux productions des arts et des sciences, des penseurs, savants, artistes […] à propos de tout ce qui se crée, il s’informe de l’offre et de la demande, afin de fixer pour lui-même la valeur d’une chose »[1].La chose aujourd’hui, c’est vous. Quelle est votre valeur sur le marché académique ? Comment la calculera-t-on ? Et surtout – question vitale – que pouvez-vous faire pour l’accroître ?
Dans la nouvelle culture de l’évaluation académique, introduite en Europe par le processus de Bologne et stimulée par la prolifération des classements universitaires mondiaux, les règles ont changé, le jeu se joue différemment. Votre vieille connaissance localiste des rouages mandarinaux ne vous suffira plus. Si vous voulez réussir à maximiser votre valeur académique, il existe pourtant des règles simples et efficaces. Encore faut-il les connaître. » Lire la suite sur le site Contretemps

Pour vous inciter à lire ce texte, voici la liste des conseils qui y sont développés :

  • Augmentez votre productivité académique.
  • Cultivez votre « facteur h ».
  • Grimpez dans le classement ATP des chercheurs.
  • Investissez dans des activités académiquement rentables.
  • Devenez un killer.
  • Ne faites pas de la recherche : écrivez des papiers.
  • N’écrivez pas de livres, tronçonnez.
  • Achetez-vous une méthode Assimil.
  • Identifiez le « facteur d’impact » de vos publications potentielles.
  • Pensez servile : vendez-vous.
  • Renforcez votre capital citationnel.

Et quelques extraits de la conclusion de l’article :

  • « (…) Si vous voyez dans le décret de notre Ministre Madame Valérie Pécresse une « atteinte à votre indépendance et un alourdissement de votre charge de travail » c’est que vous n’avez pas compris que, comme l’écrit l’Observatoire Boivigny, « le passage à l’autonomie des universités qui est en train de se mettre en œuvre perdrait tout son sens si les établissements ne pouvaient pas gérer leurs ressources humaines, lesquelles constituent leur unique richesse. » C’est aussi que vous n’avez pas saisi le sens du concept d’autonomie tel que redéfini par la LRU : il ne s’est jamais agi de « l’autonomie » au sens des vieilles libertés académiques, mais de l’autonomie managériale des Présidents d’Universités, des instances d’évaluation et des agences de financement. Votre situation, à vous, est celle d’une hétéronomie accrue. (…) De même, si vous ne voyez pas l’intérêt des réformes actuelles de l’évaluation des enseignants-chercheurs, au prétexte que vous êtes déjà évalués, par vos pairs, de façon collégiale, lors de la publication de vos travaux et dans la progression de votre carrière, c’est que vous avez manqué un épisode. Comme l’a suggéré la conférence de Bergen en mai 2005, le « management de la qualité du corps enseignant » doit en effet désormais passer par de nouvelles procédures d’évaluation, et ce à l’échelle internationale. Qui veut un marché unifié et un espace de concurrence non faussée veut aussi des étalons de mesure communs, à base harmonisée. Telle est la motivation fondamentale des réformes institutionnelles en cours sur le front de l’évaluation. L’évaluation bibliométrique n’est que la partie émergée de l’iceberg. Elle n’est qu’un des instruments mis au service de la libéralisation de l’enseignement et de la recherche (…). »

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